Oubliée (priv. Trèfle)

Youpi ! Et encore des "herbes qui soignent comme par magie" ! Ça fait des herbes que tu passes ton temps à les cueillir pour rien ! La magie, ça n'existe pas Brouillard, pour la énième fois ! me sermonne la voix dans ma tête pour la dixième fois de la journée.
Je faisais mon cinquième passage entre ma mentor et le camps en transportant les herbes que nous récoltons. Esprit du Vent, ne voulant pas perdre de temps, m'avait charger m'amener régulièrement les remèdes qu'elle trouvait.
Ouais, elle te prends sûrement pour sa bonniche !
Je me retiens de soupirer, de peur de faire volée les plantes que je tenais dans ma gueule.
Quoi ? Ça te fatigue t'entendre la vérité de temps en temps ? Tu préfères les mensonges ? Libre à toi de te leurrer : quand le rideau tombera, c'est pas moi qui vais pleurer
J'arrive au camps et retiens mon souffle. Quand je passais, j'avais toujours l'impression d'être dévisagée, que tout les gestes que je ferai s'amuseraient à mes trahir et que des milliards de regards inquisiteurs et accusateurs aller me tomber dessus, rendant la sentence, parce que j'avais marcher sur une touffe d'herbe.
Mais écoutez-la penser ! C'est désespérant, pitoyable ! Tu crois que le monde tourne autour de ta petite personne ? Je suis sûr que dans le camps, personne ne se souvient de ta présente et que ta mentor dans la forêt à déjà oublier que tu existais !
J'avance, une boule dans la gorge. Oublier. Je déteste ce verbe. J'avais "oublié" mon passé, mes souvenirs. J'aimais pas le verbe "oublier". Si il existait pas, je n'aurai rien oublié.
Tu m'as pas oublié, c'est juste que tes souvenirs se sont fait la malle : c'est eux qui t'ont oublié.
Inspire, expire, inspire, expire.
Bravo Brouillard, tu sais respirer ! Tu veux une médaille ?
Soudain, je heurte quelqu'un. Tout de suite, ma tête me fait mal, mes oreilles bourdonnent et ce bruit sourd à au moins le mérite de couvrir les ricanements de la voix, même si j'entends au loin dans ma tête un : << Mais regarde où tu marches nom de nom ! >>
Je recule d'un pas, lève timidement la tête et murmure :
<< Désolé, je ne faisais pas attention... >>
C'est le cas de la dire !
Puis, horrifiée, je me rends compte des feuilles de soucis, éparpillées sur le sol. Mais, mais pourquoi ?
C'est à cause de qui ça ? C'est la faute à Par-De-Chance hein ? Non, la tienne. Vraiment Brouillard ! Tu offres un spectacle absolument pitoyable !
Je commence à ramasser les remèdes, j'enlève la poussière qui s'est mis dessus et je les pose en tas.

Trèfle Noir pesta, ses yeux dorés figés sur la minuscule épine qui s'était logé dans sa fine patte. Impuissant, il nettoya la plaie, mais ne fit qu'aggraver les dégâts, l'épine était à présent plus profonde dans son coussinet. Le guerrier gromela contre lui-même, vexé contre son petit côté maladroit qui ressortait lorsqu'il était distrait. La douleur était presque supportable, même si poser sa patte sur le sol était un calvaire : il n'était pas faible, il pourrait continuer. Ainsi, il pressa le pas pour rejoindre sa patrouille.
Hélas, chasser à trois pattes ne s'avérait pas aussi facile qu'il l'espérait et maintenant qu'il y songeait, il avait peur que la blessure s'infecte et qu'il en perde sa patte. Je serais totalement ridicule, en handicapé du Clan :  ça ne me ressemble pas, ça ne sera jamais de ma prestance !

Il expliqua la situation à ses camarades et à son plus grand regret, le félin rentra au camps. Pour la tanière de la guérisseuse. Quelle perte de temps...
Une fois à l'entrée du camps, un petit corps bouscula le guerrier. Ce dernier, visiblement agacé, lâcha une râle, tandis qu'il remettait en place quelques mèches rebelles dues à cette petite entrevue trop proche. L'apprentie s'excusa rapidement et le félin sentit une bouffée de fierté envahir tous ses muscles : il imposait un respect et comme à chaque fois, il se sentait invincible.

- Fais attention, la prochaine fois ! râla-t'il.

Trèfle Noir s'apprêtait à rejoindre la tanière du guérisseur lorsqu'il s'arrêta brusquement, tout en fixant l'apprentie du regard. Ce n'était autre que Nuage de Brouillard, l'aspirant du guérisseur. Ce qu'il cherchait se trouvait justement juste devant lui avec quelques remèdes à ses côtés. elle fera l'affaire...

- Tiens, je te cherchais. J'ai une épine coincé dans la patte, enlève la moi, tu seras mignonne.

Je contemple le petit tas de soucis, pleine de poussière. Je vais me faire réprimander par Esprit du Vent : elle n'aime pas quand je fais de chose maladroite.
Ça tombe mal c'est tout ce que tu sais faire.
Je prends une des feuille délicatement entre deux griffes...
Ho ça va, c'est pas du cristal non plus !
Et l'agite doucement du bout des pattes, pour enlever la poussière. Après ça, je la repose par terre, en commençant un nouveau tas. Alors que je m'apprête à prendre une seconde feuille, j'entends :
<< Fais attention, la prochaine fois ! >>
La prochaine fois ? Ça veut dire que je vais refaire tomber les remèdes d'Esprit du Vent ?
Non, ça veut juste dire qu'il faut que tu évites de percuter des gens comme ça sans raison. Tu ne sais vraiment rien ou quoi ? Enfin, je devrais même pas dire "ou quoi", puisque tu es amnésique et que c'est normale que tu ne fasses rien. C'est triste les mémoires et les cerveaux défaillent, ça donnent des c***.
Mais, mais, peut-être mais c'est pas parce que...
C'est pas parce que tu n'as pas de souvenirs que ça va t'empêcher de vivre et d'avancer ? Bien sûr que si ! Si tu ne connais pas tes anciennes erreurs, tu vas les refaire à longueur de temps et ça reviens à faire du surplace ! Vraiment, t'es même pas capable de réfléchir par toi-même !
Calme-toi, c'est juste des mots, ça fais pas de blessures les mots... Alors, pourquoi ai-je mal ?
<< Tiens, je te cherchais. J'ai une épine coincée dans la patte, enlèves-la moi, tu seras mignonne. >>
Tiens, c'est la même voix que tout à l'heure.
Je lève la tête et vois le guerrier noir que j'ai percuté un peu plus tôt. Une épine dans la patte ? Ce guerrier est vraiment empoté : pour ces blessures, Esprit du Vent dire qu'on a même pas besoin d'utiliser de remède et deux coups de langue suffise.
T'es même placer pour parler de la maladresse des autres grosse maladroite !
Je regarde mon tas de soucie. Je ne peux pas les laisser là, ils risquent de s'envoler. Il faut que je les amène dans la tanière d'Esprit du Vent.
Tu vois, tu ne considère même pas l'endroit où tu vis comme ta maison : il faut mieux que tu partes, que tu quittes ce clans et ses "guerriers" et ça le plus vite possible !
Calme-toi, calme-toi...
Ça te sers à quoi de te calmer ?
Je dis d'une toute petite voix, de ma voix de guérisseuse, qui est une voix froide, sans âme ni émotion, parce que Esprit du Vent dit qu'une guérisseuse ne dois pas en avoir en publique :
<< D'abord, je dois ranger les remèdes. Après, je m'occuperai de ta patte. En attendant tu peux attendre dehors, tu seras poli. >>
J'avais repris la conclusion du guerrier, pensant qu'il comprendrait mieux si je parlais en l'imitant.
T'as vraiment besoin de 5 minutes pour répondre à quelqu'un ? Vraiment, ta timidité me sidère !
Je rebaisse la tête : c'est plus pratique de regarder le sol.