Est-ce bien sage de te croire alors que je n'ai confiance en personne d'autre que moi ? [Ft Luny]

Rêver de sang, voir la vie en rouge et le verre à moitié plein d'une boisson poisseuse. Tel est devenu mon quotidien. Enfin, cela n'a absolument rien de nouveau. Mais il faut bien organiser ses pensées non ?
Bref.
Quoi qu'il en soit, je viens de tuer mon fils.
C'était diablement amusant.
Surtout le passage où j'ai pu voir la lueur de panique apparaître dans ses yeux lorsque j'ai eu fini mon histoire. Ou encore le mouvement de recul à demi raté car il était paralysé de terreur le pauvre petit. Il était si maigre et pourtant, jusqu'au bout, il me l'a rappelée, elle. Sa mère, sa si belle mère.
Sa défunte mère.
Tuée par ses propres enfants.
Mais moi je l'ai vengée. Oh, elle m'en veut certainement beaucoup de là où elle est. Elle n'a jamais cautionné ma violence et mon goût prononcé pour le sadisme et la tuerie. Elle n'a jamais réellement accepté cette part sombre de ma personne et c'est bien dommage puisque c'est tout ce que je suis aujourd'hui.
Enfin. Qu'est-ce que j'en ai encore à faire ?
Elle n'est plus là c'est tout.
Et maintenant, même ma vengeance est partie.
Je sais ce qui va se passer désormais, ce qui arrive toujours.
Je vais l'oublier.
D'abord le son de sa voix, c'est toujours ce que j'oublie avant tout le reste. Je ne saurais plus jamais quelles intonations elle avait dans la voix, si celle-ci était puissante et captivante ou plutôt douce et discrète. Ensuite, ses traits se brouilleront dans ma mémoire et son odeur disparaîtra, elle ne sera plus qu'une masse informe au doux nom de Fragrance d'Automne. Et ensuite, au bout de quelques lunes, même son nom s'effacera et dès lors je ne saurai plus qui elle était, j'ignorerai jusqu'à son existence.
Et cela ne m'affecte même plus de le savoir.
J'ai l'habitude maintenant.

Je ne suis toujours pas rentré au camp.
Je vagabonde à droite et à gauche.
Je ne patrouille pas, je ne chasse pas, je ne fais attention à rien d'autre que moi. Même pas. Je laisse mes pattes me porter où bon leur semble, j'aviserai quand elles s'arrêteront. On verra bien où elles me mènent. Tant que je ne franchis aucune frontière...
J'avoue n'avoir guère envie de me retrouver face à face avec un stupide guerrier d'un autre Clan que le mien. Cela pourrait avoir de bien mauvaise conséquence.
Surtout pour l'autre.
Je soupire et mon souffle forme une buée blanche disparaissant dans l'air aussi vite qu'elle était sortie d'entre mes crocs. Il fait froid mais je m'en fiche. Mon pelage est un peu hérissé mais ça aussi je m'en fiche. J'ai chaud à la patte avant gauche, c'est tout et ça, je ne m'en fiche pas. Cela me fait sourire d'ailleurs. Je m'arrête, la contemple un instant et j'éclate de rire.
C'est le sang de mon erreur de fils.
Liquide pourpre et poisseux qui s'infiltre entre mes griffes, macule mes coussinets et colore ma fourrure d'un agréable rouge vif.
Et puis quelque chose me distrait.
Deux odeurs.
Alors seulement je me rends compte d'où je suis, de l'endroit où mon corps m'a mené malgré moi.
Il y a le chemin du Tonnerre. Celui qui dégage un odeur nauséabonde. Il semblerait bien désert aujourd'hui. Tant mieux. Enfin, ça n'a pas vraiment d'importance. Mais si par mégarde je l'avais traversé, au moins, je n'en serais pas mort. Sauf si je 'avais fait au mauvais moment.
Mais il paraît que je suis chanceux comme chat.
La seconde odeur vient d'un félin. Qui vient du Clan de l'Ombre.
Il semblerait qu'un imprudent ait décidé de traverser pour regarder mon territoire d'un peu trop près.
Je me ferai un malin plaisir de lui gâcher la vie.
De manière définitive.

Je m'approche puis m'arrête et jure de façon inaudible.
Ce n'est pas sa vie mais mon plaisir qui va être gâché.
Je suis tombé sur une guérisseuse.
Si elle est en train de se servir en plante, je ne sais plus trop si c'est autorisé mais je crois que si. Si je la tue cela va créer un incident diplomatique. Une guerre même. M'enfin, ce n'est pas tant que cela me dérange mais je tiens à garder mes oreilles intactes et je n'ai pas besoin que mon chef vienne fourrer son sale museau dans des affaires qui ne concernent que moi.
Je soupire et me concentre, essayant de prendre mon air le plus amical possible.
Autant vous dire qu'on a plus l'impression que je marche sur des cactus qu'autre chose. La sympathie n'a jamais vraiment été mon fort avec les étrangers. Mais je compte bien faire un effort avec cette imbécile de féline du Clan de l'Ombre.
Après tout, elle n'est rien à mes yeux alors je peux bien m'amuser un peu avec elle, non ?

"Bonjour, toi."

© Codage by Ella'

Toute vérité est mensonge, et tout mensonge est vérité ; et à partir du moment où l'on se prétend véritable, nous sommes mensongers.

Le vent soufflait doucement sur les marécages, givrant les quelques feuilles qui résistaient à la basse température de la saison sombre, là où la neige chutait. Ses pattes foulaient la terre, elle filait comme une ombre sur les territoires de son propre Clan, insensible au froid qui gagnait du terrain, et à la nuit qui s'éternisait, comme toujours. Les plantes étaient pour la plupart fânées, et la végétation désertait les lieux. Ça désolait la guérisseuse qui portait bien son nom : Esprit du Vent. Celle qui filait si rapidement, tant qu'on était point certain de l'avoir vu. Bien entendu, il lui arrivait d'aller lentement, même souvent, il lui arrivait de prendre son temps. Elle n'était pas adepte de la rapidité, seulement son physique discret la poussait à ne pas se faire remarquer. Elle s'arrêta un moment, inspira profondément et reprit sa progression en direction du camp. La féline demeurait persuadée qu'elle avait vu l'ombre vague d'un chaton qu'elle n'avait pas pu sauver auparavant : cela aurait été inutile. L'odeur de la mort s'était incrustée sur son pelage, il était condamné. Alors elle a faint tentée, préférant juste apaiser ses derniers jours pour qu'il parte tranquillement, sans souffrance. C'était mieux ainsi, selon la femelle au pelage de neige. Il lui arrivait de faire ça, laisser tomber sans essayer, bien que ce ne soit pas dans son caractère, mais dans ces moments, c'était qu'elle savait parfaitement que tenter était inutile. Quand les effluves de la mort s'imprégnaient dans un pelage, le chat ne pouvait être sauvé. Elle avait appris à l'accepter... ce ne fut même pas difficile à encaisser.
 
Après tout, elle ne possédait pas une opinion bien haute de ceux l'entourant, surtout pas des guerriers. Elle estimait bien plus le coeur impur des chatons et leur énergie sincère. Les petites boules de poil qui ne possédaient aucune liberté dans le camp, dans la pouponnière, parfois avec une mère et parfois sans. Les guerriers, eux, étaient davantage ridicules, à ramper auprès d'elle dès qu'ils avaient une blessure, pour certains bien superficiels, telle une écharde dans le coussinet. Ça venait la désespérer. Elle secoua sa tête lorsque le camp fut apparent et elle s'y élança sans véritable raison. Elle n'avait pas grand chose à faire dans ce camp, tout comme elle n'avait pas grand chose à faire en dehors. Oh, bien entendu, elle pourrait entraîner Nuage de Brouillard, mais ça ne lui tentait point. Elle préférai de loin vaquer à ses occupations plutôt que d'apprendre à un novice, une novice plus exactement. Même si dans son jeune temps, elle avait été la première à vouloir apprendre les propriétés des plantes... mais cette femelle poursuivait un but, toujours le même à ce jour d'ailleurs. Faire revirvre l'âne des défunts.
 
Parce qu'un but ne s'éteint point. Parce que la persévérance peut mener à la perte. Parce qu'elle ne pense pas à ça et parce qu'elle ne s'arrêtera pas. Parce qu'elle préfère continuer à tenter d'atteindre ses idéaux. Parce qu'elle a tout laissé pour eux. Parce que l'irréel n'affecte pas les désirs.
Parce que peu importe le nombre de parce que, la réalité reste la même ; ou la non-réalité. Et parce que peu importe ce que l'on fait ou ce que l'on dit, certaines choses ne peuvent changer
Ici, son but. Son être, son identité elle-même. Esprit du Vent est immuable.
 
Esprit du Vent s'engouffra dans le camp à l'image d'un tourbillon qui ramasse tout sur son passage, à l'exception du fait qu'elle ne déplaça que très peu d'air, si légère était-elle. Sans moindrement se presser, elle traversa le camp, jetant des regards ici et là.Certains chatons la regardaient dans les yeux puis se détournaient, légèrement intimidés. Après tout, la féline possédait un regard si froid, si vaste et si vague, presque profond et pourtant, tellement clair qu'on croirait regarder la surface d'un lac glacé. L'inconfort des autres, pourtant, ne l'atteignait pas. Elle finit par arriver dans son gîte et elle s'appliqua à trier les remèdes frais et ceux à jeter. Ceux-ci seront laissés près de la sortie de la tanière pour que sa novice se charge de s'en débarasser. Esprit du Vent s'occupa également de changer les nids de mousse pour qu'elles puissent dormir dans les meilleures conditions possibles et, par la suite, elle sortit de nouveau au grand jour, le regard alerte, et pourtant toujours implacable. Étrange guérisseuse exentrique que l'on ne comprend pas. Regard de glace qui perturbe. Elle s'éloigna rapidement, bien décidée à trouver de nouvelles plantes pour faire des mélanges. Elle était certaine qu'elle trouverait et la féline savait très bien qu'un jour, ce serait le cas, car son acharnement porterait bien sûr à un moment fruit.
 
Ainsi, elle marchait sans trop faire attention au lieu, suivant le murmure du vent qui la guidait gentiment vers le lieu où se trouvait la réponse aux secrets de la mort. Elle voulait aller déterrer la terre aussi profondément que nécessaire pour tout connaître. Feuille du Matin cherchait à l'aider, mnais ce n'était pas suffisant ! Esprit du Vent n'avait toujours pas le protocole à suivre pour permettre à la vie de ranimer ceux qui a l'avaient quitté. Alors qu'elle observait le sol, l'oreille tendue pour comprendre les sifflements du vent, elle sentit l'odeur d'un chat et en relevant la tête, elle y vit un félin dont elle identifia rapidement l'odeur : Clan du Vent. La femelle identifia sur son visage une étrange émotion, comme un sourire forcé qui ne donnait rien de beau et il la salua simplement.
 
"Bonjour ! Je suis navrée, je pense être sur vos terres, je -" elle s'interrompit. Elle n'était toujours pas habituée à cette voix qui ne lui semblait pas être la sienne, mais qui l'était. " Je n'avais pas remarqué, j'écoutais le vent. Ensuite, cher, n'essaie pas de te donner un air aimable ou que sais-je, le résultant n'en est que ridicule sur ton visage. Drôle de grimace. Sois toi-même, ça se voit que ce n'est pas naturel." miaula-t-elle de sa voix si particulièrement sienne et étrangère, froide et douce, distance et imposante.
 

"Bonjour ! Je suis navrée, je pense être sur vos terres, je... Je n'avais pas remarqué, j'écoutais le vent."

Elle écoutait... Le vent ? Elle me prenait pour un idiot ou quoi ? Depuis quand le vent peut parler aux chats ? Bon après je peux pas trop juger, elle est guérisseuse, ça fait peut-être partie de son boulot. Atypique le boulot.

"Ensuite, cher, n'essaie pas de te donner un air aimable ou que sais-je, le résultant n'en est que ridicule sur ton visage. Drôle de grimace. Sois toi-même, ça se voit que ce n'est pas naturel."

Fiou !
J'adore cette sensation de soulagement quand tous les muscles de mon visage se relâchent enfin. J'aurais bien aimé lui tenir tête en souriant obstinément mais si je dois avoir l'air d'un idiot constipé, je m'en passerais très bien.
Bon.
Je crois que je vais engager une conversation banale. Pas que ça me plaise mais qu'est-ce que je peux bien faire d'autre ? Si je la tue pour satisfaire mon plaisir personnel, ça créera un incident diplomatique important et ma vie se réduira considérablement. La vie de mes oreilles surtout. Si je pars en l'ignorant ça le fait moyen aussi. D'une j'ai été éduqué correctement, même si on peut en douter très facilement, de deux ça m'énerverait plus qu'autre chose de me dire que j'ai laissé filé quelqu'un sans rien faire. Je ne pouvais donc qu'engager une conversation quand bien même je n'avais strictement rien à lui dire à part des petites paroles sans importance qui, d'habitude, m'exaspère au plus haut point.
Bon.
Va falloir commencer à dire quelques mots parce que sinon le vent qui va souffler sera celui du silence pesant.

"Si j'étais moi-même, tu prierais le ciel pour repartir d'ici en vie."

Oups.
Ce n'était pas tout à fait ce que je voulais dire au départ. Mais bon, elle ne peut pas me blâmer, je n'ai fait qu'être moi-même. En tout bien tout honneur.
Tss.
J'en ai marre des gens qui pensent que tout doit toujours être doux et mielleux. Au moins, elle, elle m'a l'air intelligente. Elle n'oblige pas ses interlocuteurs à jour les hypocrites qui admirent son travail ab-so-lu-ment ennuyeux... Oh pardon, je voulais dire fantastique. Raah, je commence à l'analyser. Un peu plus et j'allais dire qu'elle avait marqué un bon point en me disant d'arrêter cette foutu hypocrisie.
Pfff.
Et puis quoi encore ?

"Enfin, je suis de bonne humeur donc ça ira. Sinon toi la cueillette tout ça, ça se passe tranquillement ? Tu meurs pas un peu d'ennui ?"

Ah, je verse un peu dans les banalités.
Reprends-toi Karma, reprends-toi ! Il y a du relâchement, c'est pas beau à entendre !
Bref, après tout c'est mieux que rien n'est-ce pas ? C'est mieux en tout cas que de rester là comme deux idiots à s'observer en train de réfléchir à quoi faire et quoi dire.
Oh wait.
Karma ?
Rappelle-moi ce que tu es en train de faire à cet instant précis ?
Pfff. Je suis une chose puis son contraire. Je suis quelqu'un d'imprévisible. Tellement imprévisible que je dénigre des choses que je fais moi-même.
La nature féline est bien mal faite décidément.

"Et sinon, qu'est-ce que tu lui dis de si important au vent ? Pour que tu dépasses des frontières à cause de lui, ses paroles doivent etre captivantes non ?"

© Codage by Ella'

Toute vérité est mensonge, et tout mensonge est vérité ; et à partir du moment où l'on se prétend véritable, nous sommes mensongers.

Elle n’avait jamais compris pourquoi certains chats se sentaient obligés de jouer un rôle, de ne pas se montrer comme ils sont. C’était ridicule et tellement visible dans le regard et dans l’absence de naturel. Elle avait bien remarqué le soulagement qui s’était installé à la suite de ses paroles. Elle, elle ne jouait pas de rôle, elle demeurait elle et elle ne comprenait pas pourquoi certains ne faisaient pas ça. C’était si facile de rester soi et si complexe d’être un autre. Pourquoi choisir le compliqué ? Et surtout, ça n’avait pas de sens, en tout cas pour la guérisseuse, d’afficher un autre visage que le sien. C’était tout bonnement ridicule. Et elle ne comprenait pas. Ça ne lui importait même pas de comprendre, car ça ne changerait pas du tout sa vie, et que la seule chose qui parvenait à réellement prendre en importance dans son coeur, ses yeux, son âme, c’était son but. Le but qu’elle poursuivait, la raison de sa présence à ce poste. Sa seule motivation, ce qui la gardait sur terre, et non pas là, en tant que spectatrice de sa vie. Elle penchait la tête, toujours aussi attentive au vent qui lui murmurait parfois un endroit où chercher, mais ne lui disant pas exactement où, donc la laissant là, pantoise, et sans rien. En ce moment, la saison sombre baissait ses chances de trouver, mais le vent soufflait toujours et tant qu’il soufflait,

Elle cherchait.

Et puis le guerrier qui lui faisait face s’exprima, lançant dans les airs une phrase qui semblait totalement déformée de celle qui aurait dû être dite au départ. Donc, elle devrait prier pour sortir vivante d’une rencontre avec lui s’il était lui-même ? Il devait penser faire face à une guerrière faible et soumise à la vie. Dans tous les cas, il ne savait certainement pas le caractère de la guérisseuse du Clan de l’Ombre qui se trouvait farouche, et surtout totalement fourbe, avec son habituelle tendance à se moquer clairement de la vie. Quand on se regarde souvent de loin, quand sa vie se déroule sous nos yeux, on n’est pas pour chercher à vouloir vivre à tout prix. Elle détestait rester spectatrice d’une vie, ne pas pouvoir la mener adéquatement. Bien heureusement, elle versait dans son objectif toute la détermination réelle qu’elle était capable de grappiller. Cette recherche à la plante qui lui permettrait de faire revivre les morts était donc sa recherche à elle et non pas à cette guérisseuse qui ne valait rien.

« Si tu penses que je te supplierais pour rester en vie, cesse immédiatement de penser. Tu pourrais me tuer que ça me serait égal. D’ailleurs, je pourrais trouver des choses intéressantes dans la mort… »

Elle regarda tout autour d’elle, les terres du Clan du Vent qui auraient pu lui révéler des remèdes intéressants, de nouveaux mélanges possibles, mais une terre interdite. Les règles ne la freinaient pas, mais elle pourrait provoquer un incident et faire courir bien des rumeurs et des problèmes. Elle préférait éviter, ça lui prendrait trop la tête. Esprit du Vent ne désirait pas qu’on vienne lui chercher des puces, elle devait déjà se coltiner l’apprentissage d’une novice ainsi que le soin des vulgaires guerriers qui redevenaient chatons à la moindre petite blessure futile. Oh… pourquoi fallait-il être guérisseur pour pouvoir avoir accès aux connaissances des plantes ? Comme si ça lui plaisait de chercher des plantes pour constituer une réserve. Tout ce qu’elle voulait, c’était faire des mélanges et les tester. Feuille du Matin serait toujours là dans ses rêves pour l’aider à accomplir son but, la féline au pelage blanc en demeurait certaine. Son oreille droite se dressa pour écouter ce que le guerrier avait encore à lui dire et elle réprima un petit rire ironique. Il portait dans la banalité maintenant ? Ça ne lui allait terriblement pas vu la phrase lancée auparavant.

« Oh non, je ne suis pas morte sinon je ne serais pas ici ! Quoi qu’à ce rythme… on est bien partie pour finir enterrée d’ici plusieurs lunes. La réserve est pleine, je n’ai pas à m’en faire. Enfin, je compte surtout sur ma novice pour vérifier tout ça, même si je regarde après pour m’assurer qu’elle ne fasse pas d’erreurs. Tu sais, les novices, faut toujours passer après eux. Mais moi, je vais des recherches bien plus intéressantes que la job d’un guérisser. Non mais, cueillir et soigner, tu parles d’une vocation ! »

Parler à coeur ouvert, ça elle l’avait toujours fait lorsqu’il s’agissait de parler de ce qu’elle faisait. Ce n’était un secret pour personne que la guérisseuse n’estimait absolument pas son rang, mais c’était un mystère, la raison qui motivait un tel choix vu son manque d’enthousiasme à l’idée de soigner ses pairs. Elle ne voyait même pas comment elle était supposée considérer ces félins sans cervelles comme ses enfants. Ne disait-on pas d’une guérisseuse que le Clan entier était ses petits ? Ce n’était pas son cas, en tout cas. Absolument pas. Elle dénigrait si souvent mentalement les chats qui faisaient partie du Clan de l’Ombre et se dégoûtait elle-même de devoir les soigner. Pauvre elle. Disons juste que son but était plus fort que tout. Ses moustaches frétillèrent lorsque le guerrier s’adressa de nouveau à elle avec une question beaucoup plus intéressante que sa dernière. Il se reprenait ! Elle savait bien que ça ne lui ressemblait pas, les banalités. Même sans le connaître, il n’était pas un guerrier banal. Tant mieux. Elle les détestait.

« Il me guide vers un endroit où je pourrais trouver les plantes parfaites pour un mélange. »

Et on n’expliquait pas plus. La féline laissait là un suspense, sans dire un seul mot de plus. Ce n’était même pas voulu, au final. Elle n’avait pas décidé, elle, de rendre cette phrase un peu trop vague, elle avait dit les mots comme ils lui étaient venus, avant qu’elle ne se sente de nouveau retiré de son corps, observatrice, avant que sa voix ne lui semble point la sienne, plutôt celle d’un inconnu et que les décors ne lui paraissent irréels. Elle demeurait debout, immobile, à attendre, et se sentir si désagréablement point à sa place. À l’étroit. Son regard pâle regardait le guerrier tandis qu’elle songeait à son but, dans l’espoir de redevenir elle. Songer à ce qu’elle désirait faire, ce qu’elle tentait de faire depuis toujours, une idée qui s’était imposée dès son plus jeune âge et qui avait grandi avec elle. Bien heureusement, ça fonctionna et elle se retrouva maîtresse d’elle-même quelques instants plus tard.